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De GrandTerrier

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Si l'on regarde le tableau récapitulatif des biens nationaux dressé dans l'article détaillé, on se rend compte qu'il reste deux autres grands domaines nobles faisant l'objet d'allotissements et d'enchères réglementaires, et donc de spéculations : Pennarun près du bourg et Cleuyou de Quimper. Ces propriétés et leurs mouvances sont acquises en majeure partie par les notables ou bourgeois de la ville de Quimper.  
Si l'on regarde le tableau récapitulatif des biens nationaux dressé dans l'article détaillé, on se rend compte qu'il reste deux autres grands domaines nobles faisant l'objet d'allotissements et d'enchères réglementaires, et donc de spéculations : Pennarun près du bourg et Cleuyou de Quimper. Ces propriétés et leurs mouvances sont acquises en majeure partie par les notables ou bourgeois de la ville de Quimper.  


Ces profiteurs sont négociants (Le Guen pour Kerfors, Debon à Plas an Intron, Mermet à Kervreyen, Marie Madeleine Merpaut pour le manoir et dépendances du Cleuyou), médecin (Vinoc à Pennarun), imprimeur (Derrien à Pennarun), avoués (Le Roux à Kernaou, Bréhier), la plupart initiés au sein d'une loge maçonnique locale. Beaucoup revendront très vite, et seul l'un d'entre eux, Salomon Bréhier, s'établira en élisant domicile au manoir de Mezanlez racheté au précédent adjudicataire, et il sera même nommé maire de 1808 à 1812.
Ces profiteurs sont négociants (Le Guen pour Kerfors, Debon à Plas an Intron, Mermet à Kervreyen, Marie Madeleine Merpaut pour le manoir et dépendances du Cleuyou), médecin (Vinoc à Pennarun), imprimeur (Derrien à Pennarun), avoués (Le Roux à Kernaou, Bréhier), la plupart initiés au sein d'une loge maçonnique locale. Beaucoup revendront très vite, et seul l'un d'entre eux, Salomon Bréhier, s'installera localement en élisant domicile au manoir de Mezanlez racheté au précédent adjudicataire, et il sera même nommé maire de 1808 à 1812.


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Version du 9 novembre 2023 à 14:37

Spéculations foncières autour des Biens Nationaux


Comme les articles de la période révolutionnaire (1789-1810) viennent d'être migrés sur le nouveau site, notamment le fonds documentaire des Biens Nationaux, on s'est dit que ça serait bien de dresser un tableau récapitulatif et une rétrospective de ces ventes aux enchères.

Les biens de l'Église et des nobles contre-révolutionnaires saisis lors de la Révolution française forment les « biens nationaux » dont la revente à des propriétaires privés a pour but d'éponger la crise financière nationale.

Pour toutes les communes de France, et pour Ergué-Gabéric en particulier, cette décision génère un fonds documentaire détaillé, composé de rapports d'expertise et d'adjudication qui permet de comprendre la nouvelle donne sociale et économique de cette fin de XVIIIe siècle.

Environ une quarantaine de propriétés réparties sur tout le territoire communal sont visées par cette réaffectation foncière : cf. tous les documents dans l'espace "Révolution-BN" avec leur localisation dans chacune des 10 trèves paroissiales de l'époque.

Pour ce qui concerne le patrimoine religieux, l'église paroissiale échappe aux saisies, mais ce n'est pas le cas du presbytère, et toutes les chapelles furent concernées : Kerdévot la plus renommée, mais aussi St-Guénolé, St-André, et les chapelles en ruine comme St-Joachim, Sainte-Appoline et St-Gildas.

Le Pressoir ou les Biens nationaux du Clergé, estampe anonyme

À l'exception de l'auto-attribution du presbytère et de l'acquisition de Sainte-Appoline par une négociante quimpéroise, les acquéreurs des autres chapelles sont agriculteurs ou aubergiste. En fait ces acteurs locaux n'agissent pas par spéculation, mais sont les prête-noms de la population qui désire préserver la dimension communautaire des lieux de culte.

Les chapelles de Kerdévot et de St-Guénolé seront restituées à titre gracieux quelques années plus tard à la fabrique communale. Pour Kerdévot on dispose même d'une archive attestant d'une quête paroissiale préalable à la mise aux enchères.

Les prix estimés et de vente sont exprimés en livres. En principe cette unité monétaire a été rebaptisée "franc" en 1795, mais jusqu'aux années 1810 on continue à parler en livres. Les prix d’adjudication à la dernière enchère sont soit exactement le prix de l'estimation faite par un expert agréé, soit légèrement supérieurs. Une exception pour Kerdévot : les 6000 livres faisant huit fois le prix initial de l'expert.

Le presbytère est aussi un cas particulier, il est attribué sans enchères à l'un des experts-avoués qui co-signe le rapport d'estimation, lequel Salomon Bréhier loue le local à la commune pour y loger les prêtres de la paroisse, devient lui-même maire d'Ergué-Gabéric, et revend ensuite le lieu pour un montant non négligeable au recteur, lequel restitue contre remboursement l'habitation à la « fabrique communale ».

Pour les propriétés et dépendances des nobles qui se sont rebellés contre la Révolution et se sont exilés à l'étranger, la vente en tant que bien national consiste en un transfert du foncier car les baux des domaniers et exploitants sont généralement maintenus par les nouveaux propriétaires.

Les adjudicataires doivent se plier à une vente publique aux enchères, et les prix des dernières enchères sont très souvent 8 à 10 fois supérieurs aux valeurs initiales d'estimation. Les biens nationaux les plus côtés sont dans l'ordre le manoir de Kervreyen (100 700 livres), celui de Kerfors (77 000), Mezanlez (67 100) et Le Cleuyou (50 600).

Le manoir de Lezergué du seigneur de La Marche constitue un dossier spécial car il n'est pas versé dans les Biens Nationaux, tout au plus les biens et effets laissés sur place sont mis sous séquestre. Et pourtant le chef de famille François-Louis et son fils Joseph-Louis-René sont émigrés, le premier à Jersey, le second en Guadeloupe.

Le château de Lezergué vers 1770, aquarelle Anne Cognard 2017

Mais le dernier des fils reste sur Quimper et joue de son influence auprès des autorités pour la levée des séquestres et obtient même une amnistie au décès de son père. Ainsi la famille de La Marche conserve le château de Lezergué et les tenues de Kerdudal. Par contre les dépendances de Kerfors, Kernaou et Kervreyen sont privatisées en tant que bien nationaux indépendants.

L'autre exception est le domaine de Kerjestin, à savoir le territoire sud-est de la commune, autrefois propriété des Rohan et saisie en 1592 par le roi car les Rohan sont protestants et considérés comme hérétiques. Toutes ces tenues nobles, à savoir le moulin du Faou, Kermoisan, Keranroue, Kerjestin, ont formé le domaine de la Couronne aux XVIIe-XVIIIe siècles.

Fin 1802, plutôt que d'être allotis en biens nationaux, les biens du domaine du roi sont intégralement versés au domaine de la Légion d'honneur, ce qui fait que les baux de fermage servent à financer cette institution. Lorsque le domaine de la Légion est dissout en 1807 ce sont les fermiers domaniers eux-même, et non des spéculateurs fonciers, qui peuvent racheter les exploitations.

Si l'on regarde le tableau récapitulatif des biens nationaux dressé dans l'article détaillé, on se rend compte qu'il reste deux autres grands domaines nobles faisant l'objet d'allotissements et d'enchères réglementaires, et donc de spéculations : Pennarun près du bourg et Cleuyou de Quimper. Ces propriétés et leurs mouvances sont acquises en majeure partie par les notables ou bourgeois de la ville de Quimper.

Ces profiteurs sont négociants (Le Guen pour Kerfors, Debon à Plas an Intron, Mermet à Kervreyen, Marie Madeleine Merpaut pour le manoir et dépendances du Cleuyou), médecin (Vinoc à Pennarun), imprimeur (Derrien à Pennarun), avoués (Le Roux à Kernaou, Bréhier), la plupart initiés au sein d'une loge maçonnique locale. Beaucoup revendront très vite, et seul l'un d'entre eux, Salomon Bréhier, s'installera localement en élisant domicile au manoir de Mezanlez racheté au précédent adjudicataire, et il sera même nommé maire de 1808 à 1812.


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