La légende de Torr-è-benn par un prêtre gabéricois
Un article de GrandTerrier.
| « Torr-è-benn da Cesar », ou « Casser la tête à César »
Pendant longtemps cette expression fut le symbole de la résistance des bretons d'Armorique à l'invasion romaine. Mais sait-on que l'expression fut amenée par un prêtre qui avait été chassé d'Ergué-Gabéric, émigré à Prague, et qui en 1801 publia une grammaire latine et celtique dans laquelle il affirmait que Jules César lui-même avait noté le cri terrifiant de ses adversaires. Bien sûr cette précision était une pure invention ! Par la suite des auteurs comme Alexandre Perrin ("Vie des Bretons de l'Armorique" en 1836) reprirent l'image du casse-tête breton, Eugène Sue dans son roman "Les Mystères du peuple" en fit un chant de marin, alors que des érudits ne fassent une enquête dès 1823, et ne concluent avec Emile Ernault en 1928 : « Ah vous nous fabriquez ici du faux César ! » |
[modifier] 1 Genèse de la légende : Grammatica ab Alano Dumoulin
Alain Dumoulin naquit à Lanvéoc le 8 novembre 1748. D'abord professeur au collège de Plouguernével, il était recteur d'Ergué-Gabéric lorsqu'éclata la révolution. Il émigra à Liège, puis à Prague en Bohème où il passa la plus grande partie de son exil comme précepteur. Il composa alors une grammaire latine-celtique : Grammatica latino-celtica, doctis ac scientiarum appetentibus viris composita ab Alano Dumoulin, presbytero encomii regni bohemie authore (Praguae Boheemarum, 1800). À l'origine donc d'une légende et d'une polèmique, en introduction de sa "Grammatica latino-celtica" Alain Dumoulin affirme sans faillir cette vérité qu'il considère comme historique :
Dont la traduction en français pourrait être :
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Il est vrai qu'Alain Dumoulin n'a pas complètement inventé cette histoire de cri de ralliement contre Jules César, car à la fin du 18e siècle elle faisait partie de la croyance populaire. Et notamment en 1675 lors de la révolte des Bonnets rouges qu'on appelle aussi « révolte des Torreben », le cri de guerre « casse-lui la tête » servant de signature dans un des codes paysans. Examinons maintenant les différentes réactions qui ont suivi la publication de la grammaire et la lecture du passage contesté sur la Guerre des gaules, en notant qu'elles ont généré des multiples débats et des positions tranchées, pour ou contre la véracité et l'authenticité du symbole "Torr-è-benn". |
[modifier] 2 Contestation linguistique : Le Boyer, de La Touche, H. Lowes Long, E. Ernault
Le premier débat connu eut lieu en 1823 entre Miorcec de Kerdanet et Le Boyer dans les tribune de la revue Le Lycée Armoricain. Le premier défendant l'existence d'un autre texte latin, le Lexique de Suidas, où Appien montre aux Romains des Gaulois nus : " Voilà ceux qui dans les combats vous crient Terr-i-ben" ; et le second de répliquer :
En 1836 Chasle de La Touche, le spécialiste de l'histoire de Belle-Isle-en-Mer, fait le résumé de la situation :
Et il ajoute :
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En 1859 Henry Lowes Long dans sa "Geography of Westen Europe" est plus tranchant :
Et enfin en 1928 Emile Ernault assène la critique finale dans un mémoire "Sur l'histoire du breton" de la Société d'Histoire et d'Archéologie de Bretagne :
Sources :
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[modifier] 3 Pour la légende : de Kerdanet, d'Argentré, A. Bouët, La Tour d'Auvergne, E. Sue
Après le sérieux des linguistes, revenons un peu sur les auteurs qui ont repris à leur compte les écrits d'Alain Dumoulin. Le premier d'entre eux est Alexandre Perrin dans sa "Galerie bretonne - Vie des bretons de l'Armorique". C'est le même auteur qui avait dans ce même livre révélé la lettre en breton que les Gabéricois avaient adressée au roi Louis-Philippe. À propos du cri "Torr-é-benn", symbole des révoltés bretons, il écrit :
En 1850, dans le chapitre 2 de son oeuvre "Les Mystères du peuple", Eugène Sue met en scène un jeune guerrier celte qui, prisonnier dans le camp de César, entonne le chant de ses compagnons marins :
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Sources :
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Thème de l'article : Skridoù lennegel e brezhonneg - Littérature Date de création : octobre 2009 Dernière modification : 15.05.2015 Avancement : |